Publié le 5 mars 2019 | Mis à jour le 5 mars 2019

FRANCIS CLARKE – PRIX REID 2015

PORTRAIT

Mathématicien, Professeur Titulaire à l’Université Claude Bernard Lyon 1 Institut Camille Jordan

Euler, ce héro ! La France mon paradis scientifique

En 2015, il reçoit le Prix W.T. and Idalia Reid décerné par Society for Industrial and Applied Mathematics (SIAM) aux États-Unis. Ce prix récompense les contributions majeures dans les domaines des équations aux dérivées partielles et de la théorie du contrôle.

Il est le 2e chercheur français récompensé, succédant ainsi à Jacques-Louis Lions, qui fut primé en 1998.

Quel est votre parcours ?

Je suis né à Montréal et j’ai été élevé dans un milieu francophone. En revanche, mon éducation a toujours était faite en anglais. Je suis diplômé d’un Master en mathématiques de l’Université McGill à Montréal en 1969 et d’un doctorat en mathématiques de la University of Washington à Seattle que j’ai obtenu en 1973. J’ai été recruté la même année en tant qu’assistant professeur à l’Université British Columbia (UBC) à Vancouver. En 1978, je suis promu « Full professor » à UBC à l’âge de 29 ans, ce qui était un record à l’époque. En 1984, je deviens directeur du centre de recherche mathématique à Montréal (CRM) et je mène campagne pour en faire un centre national pour la recherche mathématique et ses applications. En 1995, je m’installe en France en tant que professeur à l’Université Claude Bernard Lyon 1.

Quels sont vos domaines de recherche ?

Mes sujets de recherche sont principalement l’analyse fonctionnelle, surtout l’analyse non linéaire, le calcul des variations (mon sujet préféré en mathématiques !), la théorie du contrôle, et la modélisation mathématique. Vous avez obtenu le prix W.T. and Idalia Reid en 2015, décerné par Society for Industrial and Applied Mathematics (SIAM).

Que récompense-t-il et que représente-il pour vous ?

Ce prix m’a été attribué pour mes contributions à la théorie du contrôle et aux équations différentielles. C’était très agréable d’avoir eu ce prix. Lors d’une belle cérémonie j’ai fait un discours et j’ai reçu une médaille fabuleuse et très grande en bronze que j’ai donnée à ma mère, restée à Montréal, et qui est très contente de l’avoir ; elle la fait admirer par tout son entourage. J’ai eu aussi un chèque de 10 000 dollars américains que, lui, j’ai gardé pour moi. Je pense que ce prix représente pour nous tous une leçon : à savoir qu’on peut gagner un prix en mathématiques même si on ne fait pas partie d’une « mafia ». Que vous apporte ce prix dans votre carrière ? Puisque je suis très vieux et en fin de carrière, ce prix n’apporte rien à mon avancement professionnel. À l’exception peut-être qu’il permette d’attirer davantage l’attention sur mon récent livre paru en 2013 : Functional Analysis, Calculus of Variations and Optimal Control, Graduate Texts in Mathematics Vol. 264, Springer, qui rassemble en grande partie mes travaux sur trois de mes quatre domaines d’intérêt. Il m’a pris 10 ans de ma vie.

Quelles sont vos ambitions à présent ?

Elles sont simples. De continuer certaines recherches ciblées dans mes domaines d’intérêt.

Quel est l’enjeu de vos recherches et quelles sont leurs applications ?

Je ne me suis jamais intéressé aux mathématiques abstraites. J’ai toujours été attiré par les mathématiques qui combinent à la fois la théorie et application. Elles doivent toujours avoir une certaine application en vue. Tous mes travaux sont un peu comme cela, ce sont des maths, c’est souvent théorique mais pas toujours. J’aime le défi mathématique qui est posé par les nouvelles applications, par exemple en théorie de contrôle. Il faut trouver des outils les plus adaptés aux problèmes nouveaux, ce qui m’a toujours stimulé et je continue à le faire. C’est pour ces raisons, je suppose, que j’ai toujours travaillé avec des non mathématiciens : ingénieurs, biologistes, économistes.

Vous qui avez grandi et débuté votre carrière à Montréal, pourquoi être venu ensuite en France ?

J’adore la France. J’adore l’Europe et je suis très très content d’être venu m’installer en France. Je suis français maintenant. Je suis un grand fan de la France, pour preuve la dédicace de mon livre : « To France. To its country lanes and market towns, its cities and cafés, its mountains and Roman ruins. To its culture and history, its wine and food, its mathematicians and its fast trains. To French society. To France. »

Quel est dans l’histoire, le mathématicien qui vous a le plus marqué ?

C’est un hobby pour moi que je poursuis depuis plus de 20 ans : c’est la vie de l’Euler. Je pense qu’il est sous-estimé et méconnu. On n’apprécie pas la largeur et la profondeur de sa contribution en mathématiques telles qu’elles sont de nos jours. Je donne assez souvent des exposés à des collègues, à des spécialistes de l’histoire des maths, à des étudiants et même parfois à des lycéens. Pour moi, c’est une passion, je peux parler pendant des heures de ce personnage, de sa contribution en science et pas seulement en mathématiques.

Je peux vous résumer ces quelques heures d’exposés que j’évoque en deux phrases : « Euler était un Saint. Il a inventé les mathématiques. »

Mais alors en dehors des mathématiques, avez-vous d’autres loisirs ?

Ce fut très longtemps le tennis. Quasiment tous les jours. Et maintenant c’est le footing, dans la belle campagne où j’habite.

« EULER : LA VIE, L’UNIVERS ET LA PASSION DES MATHS » par Francis Clarke – Soirées Mathématiques de Lyon le 30 mars 2015
« EULER : LA VIE, L’UNIVERS ET LA PASSION DES MATHS » par Francis Clarke – Soirées Mathématiques de Lyon le 30 mars 2015