Publié le 17 septembre 2018 | Mis à jour le 17 septembre 2018

Aline Parreau – mathématicienne ambassadrice de la culture mathématique

PORTRAIT

C’est assez magique de voir qu’avec leur regard naïf, les élèves m’apportent un nouveau regard sur des problèmes et de nouvelles idées !

Quel est votre Parcours ?
J’ai fait mes études à l’ENS de Lyon en informatique, de 2005 à 2009. J’ai suivi un Master 2 à Grenoble puis j’ai effectué une thèse en mathématiques discrètes, une discipline entre mathématiques et informatique, dans l’équipe Combinatoire et Didactique de l’Institut Fourier, à l’Université Joseph Fourier de Grenoble, que j’ai soutenue en 2012.

J’ai ensuite été ATER (attachée temporaire à l’enseignement et à la recherche) à l’Université Lille 1, en 2012-2013. Puis, j’ai fait une année en Belgique en tant que post-doctorante à l’Université de Liège.

Enfin, j’ai été recrutée par le CNRS en octobre 2014 et affectée à Lyon au laboratoire LIRIS (Laboratoire d’InfoRmatique en Image et Systèmes d’information).

Sur quoi portent vos travaux de recherche ?
Je travaille sur la théorie des graphes. Les graphes sont des ensembles de points – appelés sommets – reliés entre eux par des traits – appelés arêtes. Ils permettent de représenter différentes choses comme un réseau social, les routes dans un pays ou des contraintes pour un emploi du temps. Pour résoudre certaines questions sur les graphes, comme par exemple quel est le chemin le plus court entre deux villes, on considère le graphe d’un point de vue informatique. On essaie alors de construire des algorithmes, c’est-à-dire des méthodes pas à pas qu’un ordinateur peut traiter, qui permettent d’apporter une réponse au problème considéré. Malheureusement, pour beaucoup de problèmes, nous ne connaissons pas d’algorithmes efficaces qui permettent de les résoudre de manière générale. Nous regardons alors des cas particuliers ou proposons des solutions approchées.

Concrètement comment travaillez-vous ?

Le chercheur est souvent vu comme un être solitaire. Pour ma part, je trouve le travail en groupe plus stimulant afin de confronter les idées. Ceci-dit, j’aime aussi réfléchir ensuite seule… pour mieux retrouver les collègues pour débattre.

Vous êtes impliquée dans les activités de médiation scientifique. Parlez-nous de vos activités

Je consacre une partie non négligeable de mon temps à la médiation (ce qui est facilité par mon poste sans charge d’enseignement). Cela fait partie de nos missions en tant que chercheur et nous sommes en partie responsables de la diffusion des savoirs auprès du grand public et des plus jeunes. La médiation permet aussi de donner un visage humain de la recherche et de briser quelques stéréotypes, en particulier sur la place des femmes dans la recherche en mathématiques et informatique. Enfin, faire de la médiation me permet de prendre du recul sur mes thématiques de recherche et de mieux communiquer au quotidien.

En pratique, j’interviens dans plusieurs structures : MMI, Math.en.JEANS, Maths à modeler ; et sous plusieurs formats : conférences, ateliers de recherche, organisation d’événements… Ce qui m’intéresse le plus, c’est de créer un lien entre le monde de la recherche et le reste du monde, en mettant les élèves ou le public dans la peau d’un chercheur ou d’une chercheuse en mathématiques. À partir d’un sujet de recherche adapté, l’élève construit sa réflexion, élabore des théories, les prouve, les explique… Cela permet à la fois de montrer une autre image des mathématiques, de faire comprendre le métier de chercheur en mathématiques et de développer l’esprit critique et logique.

Vous faites partie de l’équipe de la MMI. Pouvez-vous nous la présenter ?
La Maison des mathématiques et de l’informatique est avant tout un lieu (situé dans le 7ème arrondissement de Lyon) qui permet de rassembler tout ce qui peut se faire en médiation en mathématique et informatique à Lyon. Elle est gérée par des enseignants-chercheurs et c’est ce qui fait toute sa spécificité et son originalité par rapport à d’autres structures, car elle est très proche du monde de la recherche.

Les activités qui s’y déroulent sont consacrées à différents types de public. La journée, ce sont surtout des ateliers pour les scolaires. Le week-end, la MMI est ouverte au grand public pour son exposition et sa ludothèque. Enfin, des activités pour un public d’initiés ont lieu de manière récurrente en soirée.

C’est un lieu très ouvert. Si quelqu’un a envie de monter un projet, l’équipe va l’aider à trouver la possibilité de le faire.

Que vous apporte le Labex MILYON ?
En plus du soutien financier à la MMI, le labex soutient et organise des événements de recherche, en particulier entre les différents laboratoires de mathématiques et informatique de Lyon. Il permet ainsi de rapprocher les différents groupes lyonnais en mathématiques et informatique. Par exemple, j’ai participé à l’organisation du semestre thématique « Graphes, groupes et dynamique » qui a eu lieu entre septembre 2017 et février 2018 (il a rassemblé environ 300 personnes). J’ai principalement organisé le workshop « Mots et complexité » du 19 au 23 février 2018 qui a réuni 60 personnes venues du monde entier. Cet événement a été organisé par des membres de quatre laboratoires différents.

Qu’est-ce qui vous fascine dans votre métier de mathématicienne ?
Je vois les mathématiques comme un jeu. J’aime leur aspect ludique. C’est d’ailleurs souvent ce que nous utilisons en médiation.

Personnellement, j’aime aussi « l’exactitude » des mathématiques. Un résultat prouvé ne peut être réfuté, il y a une notion de réalité absolue.

Pourtant, les mathématiques restent mystérieuses. Nombre de problèmes d’apparence très simple restent non résolus à ce jour !

Cela me permet de proposer à des élèves (dans le cadre de MATh.en.JEANS par exemple) des problèmes faciles à comprendre mais encore étudiés par les chercheurs. C’est assez magique de voir qu’avec leur regard naïf, les élèves m’apportent un nouveau regard sur des problèmes et de nouvelles idées !